BODY POSITIVE OR NOT?

Voilà, l’été pointe son nez, et avec lui son cortège de complexes. Trop grosse, trop maigre, trop flasque, trop ridée derrière mes verres fumés, trop boudinée dans mon shorty, trop tout !

Et puis un jour, le « body-positive », tout droit sorti des réseaux sociaux, fait son apparition. Son credo ? L’acceptation de soi.

Bonne idée sur le papier mais, quand est-il dans les faits ?

1. DE QUOI S’AGIT-IL ?


Une phrase qui résume l’essence même de ce mouvement ?
Toutes les physionomies ont de la valeur. Il n’existe pas de bonne ou de mauvaise morphologie.
Il ne s’agit pas, ici, de décrier les femmes minces au profit des femmes grosses : le principe n’est pas de changer son idée de la perfection, mais plutôt de comprendre que la perfection… Peut prendre toutes les formes !
Les femmes qui suivent le mouvement body-positive ont pour volonté de faire entendre la voix des personnes qui n’ont pas un corps dans la norme représentée par notre société actuelle. Elles partent du principe que, plus la diversité est affichée… Plus elle sera célébrée.

Comment ? En partageant des photos/vidéos de soi sans chercher à masquer ses petits défauts, mais – bien au contraire avec la volonté de les sublimer et de casser les codes.
Il s’agit de se réapproprier son corps et d’apprendre à s’aimer. C’est un premier pas à franchir pour atteindre une forme de sérénité, et surtout, faire la paix avec son corps.

Je me souviens de l’émission Belle toute nue (M6 diffusée de 2008 à 2012) censée redonner estime de soi à des femmes rondes qui n’aimait pas leur corps sans passer par la case régime ou chirurgie esthétique.
Elle se terminait par un shooting photo dans le plus simple appareil. L’objectif était de montrer à la participante que l’on pouvait être grosse (appelons un chat, un chat) et photographiable. Comme si l’idée de se voir nue et (feindre?) d’accepter ses imperfections pouvait déclencher automatiquement l’amour de soi et le respect que l’on se doit.

Ce passage à l’acte maladroit était sans doute le premier pas. Celui qui vous pousse à dépasser nos peurs et briser nos tabous !

2. POUR QUEL OBJECTIF ?

Grâce à ce type d’initiative, la lutte contre la grossophobie, l’âgisme, les différences dans leur globalité, a fait un bond en avant.
Face à la puissance de ces femmes militantes et body-positive, les marques prescriptrice de tendance n’ont plus eu vraiment le choix : il leur a fallu suivre le mouvement. Le secteur du prêt à porter propose, à présent, des tailles de vêtements plus larges, voire conçues exclusivement pour des types de morphologies en particulier : plus grosses, avec des poitrines volumineuses, des cuisses, des fesses, ou au contraire, les formats minis.
Les formes et les corps sont sortis de leur ghetto. S’habiller en 46 et + n’est plus un parcours du combattant et les petits gabarits ont, à présent, des pièces dédiées.
Des marques créateur comme Makemylimonade l’on tout à fait intégré dans leur production.

La cosmétologie, a, elle aussi, réagit. L’Oréal a mis en avant le grand âge en prenant Jane Fonda comme porte-étendard des plus de 80 ans, tandis qu’Andie McDowell affiche fièrement ses cheveux blancs.


Un réel progrès diront certains, une grande mascarade pour d’autres.
Certes, ces exceptions existent, mais ne sont pas pour autant la norme. Surtout dans le monde de la mode. Comme le révèle Victoire Maçon Dauxerre, ancienne mannequin et aujourd’hui comédienne, la présence de mannequins ‘plus size’ aux défilés de haute couture n’est là que pour cocher des cases et répondre à une stratégie marketing.

3. UNE INJONCTION À S’AIMER À TOUT PRIX ?

Comme tout concept à la mode, le mouvement body positive a été très vite récupéré à des fins marketings par les médias, les marques et la publicité.

À tel point que nombreuses sont les influenceuses à prôner le naturel et le body positive sur Instagram alors qu’elles se rapprochent davantage d’un 36 que d’un 46 et qu’elles correspondent aux canons de beauté traditionnels : sveltes, donc, mais aussi souvent blanches, aux cheveux soyeux et au nez fin. Même, Louise Aubery alias Mybetterself, la star du moment en la matière, ne déroge pas au cliché. Son feed regorge de contenu la montrant manger des pâtes aux truffes, des pâtisseries, montrer ses poils sous les bras, partager ses reels avec TaniaMakeYou en mode taille 38 VS 48.

Alors ok, on n’a pas besoin de faire une taille 48 pour avoir le droit de prôner le body positive, certes, mais c’est beaucoup plus confortable de le faire dans ce sens.

« Le body-positive prôné par les starlettes du showbiz et des réseaux sociaux s’arrête, souvent, au moment où commence la norme acceptable. »

Revers de la médaille, à force d’inciter les femmes à s’accepter à tout prix, on les pousse à avoir honte quand, dans des mauvais jours, elles n’arrivent pas à cohabiter avec leurs complexes. Parce que oui, tailler un 48 dans un monde de 38 ça développe des complexes, qu’on le veuille ou non! On peut s’en accommoder, mais la réalité de notre société refait toujours rapidement surface.

L’acceptation de soi passe, hélas, par l’acceptation de tous les autres, donc par la société. Les vieux, les gros, les handicapés, les différents en tout genre sont rarement fédérateurs en tant que personne lambda.

Devoir s’aimer à tout prix devient, alors, une injonction supplémentaire qui s’ajoute aux diktats de d’archétypes enracinés depuis la nuit des temps dans notre société patriarcale et occidentale.

Une chose est sûre, cette relation complexe avec notre apparence n’est pas prête à disparaitre.
Le mouvement body positive devrait, avant tout, être l’occasion de questionner et de politiser notre rapport aux corps ainsi que l’image qu’on a de soi, sans y ajouter de nouvelles injonctions.

Vouloir paraitre plus jeune, plus mince, plus dans la norme ou vouloir s’accepter tel quel, sont des arguments légitimes et entendables.

Après tout, chacun.e a le droit d’avoir des jours où on s’aime et d’autres où, au contraire, on cacherait bien nos complexes sous un jogging ou un pull tout doux. 

Et ce n’est pas grave, nous sommes simplement humain et tentons de nous épanouir dans un monde taillé par et pour les normes.